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Lettre ouverte - 2009 05 02 - À Louis Cornellier
ANGLAID - La mauvaise croisade de Michel Brûlé – Vraiment !?

L’anglaid, l'angle laid de la superbe majesté majuscule du JE impérialiste

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ANGLAID - Michel Brûlé

ESSAIS QUÉBÉCOIS - La mauvaise croisade de Michel Brûlé

Louis CORNELLIER - Le Devoir - 2009 05 02 - Vigile -





L’anglaid ! Pourquoi pas ! S’il l’est ! L’anglaid, l'angle mort de la supposée efficience.

On ne peut tout avoir faut croire, la beauté et l'efficacité...


M. Cornellier,

Vous avez raison, Michel Brûlé, si l’on se fie à votre compte-rendu de lecture, se range du côté des francophobes, au sens langagier du terme. Et, personnellement, j’estime que la francophobie doit pouvoir trouver son pendant anglophobe, toujours au sens langagier. Ce qui est à distinguer du racisme, ou du moins ce qui en serait une variante qui n’est pas tant raciale que langagière. Pour le reste, il semble que M. Brûlé ne soit pas tant raciste qu’anti-impérialiste. Nuance ! L’antiétatsunianisme a bon dos... quand il s’agit plutôt de l’anti-impérialisme. Quoique, dans le cas de Michel Brûlé, il faudrait juger sur pièce s’il n’ajoute pas à l’anti-impérialisme quelques touches de manifestations de racisme, pour peu que l’anglophonie forme une race du reste. Que dire de toutes celles et ceux qui se mettent à l’anglais, forment-t-ils dès lors une race par dessus les races ?

Quant à l’hypertrophie du JE anglophone, vous omettez de dire à propos des Russes ou des Japonais que la pareille dans leur cas montre bien a contrario ce que tente de démontrer M. Brûlé. Tout impérialistes qu’ils soient, ils sont des amateurs au regard de l’Empire britannique où le Soleil s’est un jour levé pour ne plus jamais se coucher, l’Empire étatsunien n’en serait que le prolongement contemporain. Et leur assidu empressement à se poser en maîtres du monde trouverait dans ce JE hypertrophié l’un des indicateurs de la superbe qui les a fait se justifier de le devenir, qui les fait se conforter de l’être, et s’encourager de le demeurer.

Et oui, pour un francophone, l’anglais est une langue laide, gauche, grossière ( si peu raffinée ). Ce qui n’en fait pas pour autant je vous l’accorde un principe permettant de justifier le racisme antiétatsunien ou antibritannique, mais qui permet hors cela de conforter un anti-impérialisme qui a bel et bien lieu d’être à bon droit. Quant au « phonéisme », quant la détestation d’une langue, faudrait voir où cela nous mène. Si cela permet de ralentir le tout à l’anglais, ne serait-ce que ralentir l’anglicisation du monde, si cela permet d’encourager la diversité « phonéique » et culturelle, peut-être que la détestation de l’anglais pourrait être un pendant utile à sa survalorisation qui à terme annonce la disparition de toute autre langue occidentale, à commencer par le français.

Cela n’excuse rien, mais quand on voit le monde anglophone s’en prendre à la France, à la langue française, à l’esprit français avec un tel sans gêne, une telle hargne, comme on a pu le voir après le refus de la France de suivre le matamore mal embouché de Bush, il me semble que l’on pourrait voir dans cette réplique qu’un bien normal retour d’ascenseur qui n’est que le miroir d’une francophobie qui participe au succès de l’impérialisme culturel anglophone. On ne peut nier la suffisance et le « complexe de supériorité » anglophone, la superbe majesté majuscule du « I » me semble en témoigner, comme bien d’autres indicateurs. Ils ne font pas foi de tout… ils indiquent une… tendance... La pareille francophone ne se justifie pas pour autant, mais peut-être qu’elle participerait à la constitution d’un arsenal diversifié permettant de répliquer valablement à l’anglophilie atavique qui nous afflige, tout racisme exclu.

Une chose est sûre, M. Brûlé n’a pas froid aux yeux puisqu’il ne doit pas ignorer que notre peur maladive d’être accusés d’ethnocentriste, de nationalisme fermé sur le monde, voire de racisme, ne manquera pas de nous faire tomber à bras raccourci sur tout ce qui pourrait de près et de loin justifier de telles accusations, même si elles ne tiennent pas compte des distinctions à faire. Vous en faites, mais il me semble que vous ne considérez pas tout ce qui doit l’être. Vous me semblez abonder dans ce tordage de bras cependant par la faiblesse de votre réplique en ce qui concerne la pareille russe ou japonaise. Être anglophobe, au sens langagier du terme ne nous ferme pas au monde. Le prétendre montre bien à quel point l’anglophonie se prend pour le monde tout entier.

L’attraction de la beauté est un moteur indéniable de l’avancement humain. La laideur un répulsif. Pour peu que l’on soit du côté de la diversité culturelle, le fait de considérer laide la langue anglaise me semble être un moteur utile pour contrer l’avancée du rouleau compresseur anglophile. L’Anglophilie langagière y trouverait un rempart utile alors qu’elle nous assiège avec tant de succès, ses assauts sont quotidiens, voire horodatés.

La langue anglaise est-elle en soi laide ? Qui peut le dire ? Une chose est sûre elle peut apparaitre telle à maints locuteurs de langues plus subtiles et sophistiquées. Quel est le problème ? Pourquoi refuser de tabler sur ce sentiment pour conforter les autres locuteurs de langues autres dans leur désir de ne pas disparaître, alors que tant d’autres militent en faveur de l’utilisation à outrance et tous azimuts, sans nécessité véritable, de cette langue supposée universelle, jusqu’en France, bien inconsciente et insouciante me semble-t-il. Peur d’être déclassé, séduction du plus fort, paresse intellectuelle, sentiment de confort et d’indifférence que procure la voie de la facilité et de la commodité, etc.

Cela dit, je suis avec vous s’il est question de ne pas faire déborder cette notion vers l’anglophobie autre que langagière. JE pense que cela est possible. Notre langue, l’esprit de notre langue française, notre esprit humain tout court le permettent. En ce sens l’équation qu’il ne faut pas induire cependant, c’est celle qui voudrait que l’esprit pauvre d’une langue soit l’image obligée d’un esprit pauvre de ses locuteurs. Ce que je ne me permets pas de conclure en constatant le pauvre esprit de la langue anglaise.

Cela m’épate néanmoins. Comment l’esprit humain peut malgré tout s’exprimer subtilement avec une langue si pauvre ? Cela m’échappe, mais ne doute pas une seconde que ce soit possible. J’en veux pour preuve notre propre usage de la langue française. Cette langue française appauvrie que nous utilisons communément au Québec ne fait pas de nous des idiots. Du moins pas forcément. Forcément, l’esprit humain parvient à s’exprimer subtilement sans pour autant employer une langue de pareille nature. Cela doit se passer sans doute dans les silences, dans le sous-texte, dans le non-dit, voire le mal dit. Mais n’empêche… rien n’interdit de parfaire notre Connaissance et d’apprendre à utiliser tout ce que permet la langue française. Nous nous y employons tous les jours. L’anglais pourrait sans doute faire de même, du reste il le fait, l’emploi de plusieurs « francismes » le prouve. Se pourrait-il que s’invente une langue anglaise plus subtile… un jour ? Pourquoi pas ! On peut rêver de ça comme d’une diversité culturelle et politique qui sonnera la fin de l’affreux et laid impérialisme culturel et politique qu’il soit britannique, étatsunien, russe, japonais ou... chinois...

Au plaisir, Luc A.

 

DOCUMENTATION et LIENS

  • Tribune libre de Vigile - Discussion
    Louis CORNELLIER - « La mauvaise croisade de Michel Brûlé » – Vraiment !?
    L’anglaide et superbe majesté majuscule du JE impérialiste
    L’anglaid ! Pourquoi pas ! S’il l’est ! L’angle laid mort de la supposée efficience
    Luc Archambault   2 mai 2009

 


 

Louis CORNELLIER - Le Devoir - 2009 05 02 - Vigile -

 

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Essais québécois

La mauvaise croisade de Michel Brûlé

Louis Cornellier
Le Devoir samedi 2 mai 2009

 










On peut très bien considérer que la langue anglaise prend trop de place, dans le monde en général et au Québec en particulier, et néanmoins ressentir un malaise à la lecture d’Anglaid (comme dans anglais = laid), le récent pamphlet de Michel Brûlé. C’est que cet ouvrage constitue moins un plaidoyer en faveur du Québec français et de la diversité linguistique dans le monde qu’un réquisitoire débridé contre la culture anglo-saxonne.


Richard Martineau a qualifié ce pamphlet de raciste. On voudrait bien donner tort au chroniqueur, puisque ce qu’on connaît de l’éditeur des Intouchables ne nous porte pas à cette conclusion, mais il faut reconnaître que Brûlé, cette fois-ci, ne s’aide pas. À la limite, affirmer « que les Anglais et les États-Unis [sic] sont les peuples les plus bornés et les plus ethnocentriques qui furent » peut passer, mais qualifier de sous-hommes les habitants des pays anglophones, principalement les États-Uniens, les Anglais et les Canadiens, sous prétexte qu’ils mangent des hamburgers et des hot-dogs (j’en mange aussi !), est inacceptable, même sous le couvert d’un prétendu humour. De plus, quand Brûlé lance que « l’anglais n’est pas une belle langue » et que « les États-Uniens et les Canadiens anglais le parlent comme un chien qui jappe, et les Britanniques, comme un serpent qui siffle », il est difficile de ne pas conclure au moins à un ressentiment teinté d’une forme de racisme.

L’erreur de Michel Brûlé n’est pas de nous inviter à faire de la résistance face à l’anglais. S’il ne s’agissait que de cela, qui est parfaitement légitime, son combat, dans une logique de préservation de la diversité linguistique et des identités nationales, mériterait d’être salué. Son erreur consiste plutôt à déprécier une langue et ses locuteurs pour valoriser la langue française et les autres, comme si ces dernières n’avaient de valeur que parce qu’elles constituent des antidotes au crétinisme intrinsèque de la langue anglaise.

Or si, au Québec, il convient de défendre le statut du français comme seule langue d’usage public nécessaire et suffisante, ce n’est pas parce que l’anglais serait porteur de toutes les tares — soutenir une telle position confinerait au racisme —, mais parce que le français est notre langue, vaut en lui-même et parce que négliger de défendre, pour reprendre l’expression de Christian Dufour, sa claire prédominance au Québec nous condamnerait à un statut de citoyens de deuxième zone. On peut, en d’autres termes, aimer les cultures britannique et états-unienne, mais refuser de s’y fondre.

« C’est justement parce que les langues constituent des systèmes indépendants de la réalité extralinguistique qu’il est si difficile de définir la nature exacte de la relation entre langue, pensée et réalité », explique la linguiste Marina Yaguello dans son Catalogue des idées reçues sur la langue (Le Seuil, 1988). « La langue se moque de savoir si les pommes de terre, dans la réalité, se comptent ou ne se comptent pas : le mot Kartoffel, dénombrable en allemand, est devenu indénombrable en russe, où il a été emprunté (on est obligé de dire "manger de la pomme de terre"). »

Michel Brûlé, lui, pourtant fier polyglotte, n’a que faire de la science linguistique et de la prudence interprétative qu’elle impose. Il se targue d’avoir fait « une observation majeure », c’est-à-dire d’avoir « découvert qu’une des composantes les plus importantes de la langue anglaise était mauvaise ». Selon lui, en effet, le fait que le « je » anglais, le « I », soit toujours en majuscule expliquerait le « je » hypertrophié des anglophones et leur mépris des autres. Brûlé, d’ailleurs, écrit toujours « pierre ELLIOTT trudeau » en mettant en majuscules la part anglaise de l’ex-premier ministre du Canada, pour mettre en évidence sa perfidie. Le premier ministre du Québec, lui, doit se contenter d’être désigné comme « John James Charest ». Le « I » anglais comme fondement de l’impérialisme et de l’ethnocentrisme des locuteurs de cette langue : voilà l’extravagante et désolante thèse que nous sert Brûlé.

Comment le pamphlétaire, qui se dit « russophile impénitent » et ne manque pas de nous faire savoir qu’il « parle couramment le russe », explique-t-il alors l’impérialisme russe, un pays dont la langue fait un emploi facultatif du pronom sujet ? Les Japonais, reconnaît Brûlé, « ont été de terribles impérialistes à l’égard des Coréens et ont tout fait pour éliminer la langue coréenne ». Pourtant, il précise qu’il a « toujours eu envie d’apprendre le japonais, une langue magnifique, afin de mieux comprendre ce peuple distingué, courtois et raffiné » qui n’a « rien à voir avec les États-Unis, quoi. » Ce principe du deux poids, deux mesures illustre clairement l’antiaméricanisme primaire qui anime le pamphlétaire. Parti en croisade pour la diversité linguistique, il s’égare en un combat douteux contre la nature de la langue anglaise qui pervertit ses locuteurs ! Or, si nier l’impérialisme anglo-saxon serait ridicule, lui attribuer presque le monopole du mal ne l’est pas moins, surtout si, pour ce faire, on doit se livrer à des élucubrations linguistiques.

D’ailleurs, en matière d’élucubrations en tous genres, l’auteur d’Anglaid est prodigue. Ainsi, selon lui, les États-Unis auraient comploté les scandales du SRAS, de la grippe aviaire et du lait contaminé pour nuire à la Chine ; la CIA aurait assassiné Jimi Hendrix, Jim Morrison et Janis Joplin pour écraser le mouvement hippie ; et, évidemment, cela affirmé sans démonstration, les attaques du World Trade Center seraient le fait des États-Unis eux-mêmes. Le philosophe Charles Taylor, dans ces pages, est qualifié de « salaud » et l’homme d’affaires Paul Desmarais est comparé à Duvalier.

Les Québécois colonisés qui communient à l’autel du tout-à-l’anglais ont certes besoin d’être ramenés à l’ordre et de se faire expliquer que leur soumission constitue un reniement à eux-mêmes. La langue anglaise n’est ni laide ni maléfique, mais elle n’est pas notre langue et n’a pas à le devenir, sauf comme langue seconde pour ceux qui le veulent. Si l’espagnol — que Brûlé souhaite voir devenir la nouvelle langue internationale — brillait un jour par une semblable omniprésence, il conviendrait d’avoir la même attitude envers lui.

***

louisco@sympatico.ca

***


Patriote-Écrivant - Collectif IQ-Identité québécoise - © 2009

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1.   2010 05 22 - 13:28 Jean-Guy Beaulieu - Retraité - Drummondville - (Québec) Canada -

2.   2010 05 20 - 21:41 Marc Galarneau - - Montréal - Canada -

3.   2009 05 02 - 19:43 Luc Archambault - Peintre, sculpteur, performeur et céramiste - Saint-Étienne-de-Lauzon - Québec -


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